Un sommet fier et prestigieux

Publié le par Matthieu EVRARD

 
L'aiguille Verte : 4122m. Sommet qui symbolise bien des fantasmes pour toute personne qui apprécie la montagne et les beaux sommets. Elancée, prestigieuse, la Verte ne possède pas réellemet de voie d'accès évident.

Couloir Whymper, nant Blanc, arete du Moine, arete des Grands Montets, couloir Y, couloir Couturier, la difficulté minimale est AD.

« Avant la Verte on est alpiniste, à la Verte on devient montagnard... » - Gaston Rébuffat

Cette citation illustre un peu ce côté mythique de la Verte : ce n'est pas un sommet anodin et il nécessite une certaine expérience.

Lundi 5 Mai 2008 : une fois de plus je me retrouve avec Stef et Mathieu à prendre la benne de l'Aiguille du Midi. Descente de la vallée Blanche, puis montée au Couvercle par les Egralets pour tenter le couloir Whymper, voie normale de la Verte.

Une dizaine de personnes au refuge, que des étrangers : italiens et hollandais. Petite prise de bec avec ces derniers qui monopolisent toutes les casseroles, et ne veulent pas nous en lacher une pour faire fondre la neige...

Nuit courte et agitée car à 23h une cordée de 2 allemands arrive au refuge en provenance du couloir Couturier. Conditions très difficiles apparemment... Nous aurons l'explication à Argentière deux jours plus tard, ils ont tiré des logueurs tout le long, même dans les sections neigeuses (Effectivement avec Lionel on a trouvé leurs traces de relais, creusé dans 60 cm de neige pour trouver la glace).

Lever à minuit, on gagne la rimaye du Whymper 2h20 plus tard. Au passage on croise une cordée de tchèques, qui ont peiné dans le Couturier. On passe la rimaye et de nuit on galère un peu pour trouver le bon itinéraire. On finit par renoncer, persuadés de s'être plantés... Alors que non !!! Les boules, retour au Montenvers un peu blasés, en passant par le glacier de Talèfre : ponts de neige dangereux au dessus du torrent, ne pas prendre cret itinéraire !

Pour la fin de semaine, j'ai contacté Lionel, que je connais depuis tout petit vu que nos parents étaient voisins. Il n'a pas fait la Verte ni les Courtes, donc on verra sur place. Je réserve au refuge d'Argentière.

Mercredi, je retrouve Lionel chez Aurélie à Mont Saxonnex, direction Cham' puis les Grands Montets. A Lognan je me rends compte que j'ai oublié l'ARVA dans la voiture... Hésitation à redescendre... Tant pis, il est déjà 15h, et il y a 10 ans personne n'en avait ;-)

Descente des Grands Montets dans une neige pourrie, et avec les gros sacs bonjour les cuisses. On gagne rapidement le refuge, et direct au lit. Très bon dîner en compagnie de quatre Anglais, puis on file au lit. Lever à Minuit, départ à 0h20.

On descend tant bien que mal sur le glacier d'Argentière à la lueur des frontales, puis on met les peaux de phoque pour remonter le glacier des Rognons. On gagne le pied du couloir Couturier vers 2h20. On troque les skis pour les crampons, et on s'encorde.

Skis sur le sac, piolets en main, nous voilà partis. Petite hésitation au passage de la rimaye, pas évident à trouver de nuit. On s'élève assez vite dans le couloir jusqu'à venir buter sur un passage en glace. Je sors le deuxième brin de corde et Lionel se lance en tête. Une bonne onglée plus tard, je me lance à mon tour dans la glace. 5m sous le relais qu'il a installé, Lionel me demande de faire un autre relais, le sien est posé sur une bande de glace qui émet des craquements suspects... Rapidement je fais un autre relais et Lionel repart pour une deuxième longueur. Au moment ou je lève la tête, je prends un bloc de glace de la taille d'une balle de tennis en plein dans l'épaule gauche. Ambiance !!!!

Je rejoins Lionel au second relais sur deadman, on se réencorde à 2m et je laisse filer les 60m de corde entre mes jambes, n'ayant pas envie de retirer mon sac en pleine pente.

Le jour se lève mais le ciel est plein de nuages. Le sommet de la calotte est également pris. La course de Stéphanie de C2C dans ce même couloir Couturier me revient en tête... Mais les nuages se dissipent et on passe au dessus d'eux. On a droit à un sublime lever de soleil, avec mer de nuages, un des plus beaux que j'ai vu en montagne. Encore plus beau que celui qu'on avait eu au Chardonnet avec Stef. Quelle ambiance !

Le second tiers de la voie est très soutenu, la pente frise avec les 60 degrés. On passe les séracs par la gauche et on prend pied sur la fameuse calotte sommitale. Le topo indiquait que la pente se couche à 45 degrés, que dalle, ca reste bien raide !!! 50m sous le sommet, on butte sur un passage en glace. Glace vive très dure qui achève les cuisses et les mollets. Lionel fait une petite longueur de 20m, puis je le rejoins et j'enchaîne en tête pour une dernière petite longueur en mixte et je me rétablis sur l'arête sommitale, juste sous le sommet. Je gagne rapidement le sommet et j'assure Lionel.

L'émotion me gagne... si je me suis mis à l'alpinisme, c'était dans le but de gravir la Verte, et je me trouve maintenant là-haut. De plus on relache un peu la pression qu'on avait à la montée, car dans le Couturier ne pas tenir l'horaire c'est s'exposer aux chutes de pierres et de glace.

20 minutes plus tard on descend l'arête qui conduit au col de la Grande Rocheuse, puis on bascule dans le Whymper. On enchaîne les rappels, on en fera une dizaine au total. On passe la rimaye et enfin on fait une PAUSE bien méritée :-)

 

 
On refait les sacs, on rechausse les skis, et on file :-)
Descente assez bonne dans la transfo jusqu'au Couvercle, puis on descend les échelles des Egralets. Descente de la mer de Glace jusqu'à la grotte de Glace. Mauvaise surprise, la télécabine est fermée et il nous faudra remonter jusqu'à la gare à pied...

A Chamonix nous prenons le bus jusqu'a Argentière où nous attend le camion de Lionel, la boucle est bouclée, et le rêve est accompli...

Publié dans Année 2008

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